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Billets d'humeur d'un cine-télé-spectateur

Jusqu'à la garde : le massacre du père !

L'ASSASSINAT DE L'IMAGE DU PÈRE

 

Le film de Xavier Legrand est un bien piètre témoignage (ou illustration) de ce que peuvent vivre les "familles désunies", où les enfants deviennent otages de l'un ou l'autre des géniteurs!

 

Selon certains, dans la presse, il s'agirait du traitement de la "violence conjugale" et pour d'autres, des déchirements qui meurtrissent les enfants d'un couple désuni...

 

 

Dossier de presse

 

Si la réalisation, loin d'être "parfaite", est assez réussie (avec de GROS défauts), si les interprétations y sont excellentes, il n'en reste pas moins qu'un film, c'est avant tout un scénario, donc une histoire, donc des personnages. Or, ici, de personnages, nous n'avons que des caricatures grossières (magnifiquement mises en scène), qui se fondent aisément dans le moule du lieu commun quant aux problèmes de couples qui se séparent nonobstant la présence d'enfants. Sur ces images d’Épinal, maintes fois copiées au cinoche (quoiqu'en disent les critiques acquis à la cause de ce film), viennent se greffer des situations abracadabrantes, confuses, un brouillard de contre-sens dont la seule raison d'exister est de "faire un film". Tout est "inventé" ici pour raconter en images, si possible percutantes, le drame d'un couple "comme les autres", enfin, comme les autres qui se déchirent pour leurs enfants.

 

La psychologie des personnages est aussi peu crédibles que le déroulement du sujet est alambiqué. Difficile de suivre dans le détail le film des évènements et de croire à la réalité des protagonistes : leur évolution psychologique est incertaine, leur transformation improbable...

 

Des personnages en faux-semblants


Car tout scénariste connait cette règle élémentaire jugée indispensable à un "bon" scénario : permettre aux spectateurs de s'identifier à l'un ou l'autre des personnages. Généralement, on entre en sympathie avec tel "héros" de l'histoire dès les premières séquences. Cette magie opère nécessairement à condition que... les personnages soient crédibles. Il faut donc une empathie naturelle, instinctive, laquelle ne s'opérera que si la psychologie des personnages entre dans le jeu pour nous "bluffer". Dans le film de Legrand, rien de tout cela : on oscille de droite et de gauche selon les séquences, où seul l'enfant Julien (11 ans) tire son épingle du jeu malgré quelques fausses notes (à l'écriture non dans son jeu).

 

Les "nœuds dramatiques" sont cousus de fil blanc bien qu'en sac de nouilles. Cousu de fil blanc (un "implant" en début de film est si visible qu'on connaît déjà la "chute" du scénario), l'intrigue ou argument vogue la galère tant bien que mal, distribuant ici le meilleur rôle au mâle (le père) et là à la génitrice - dont on ne sait si on doit la détester ou la plaindre!

 

Les intentions déclarées, que reprennent les critiques en encensant le film, ne cadrent pas avec son développement ! Le scénariste n'a pas su choisir entre telle ou telle option, alors il compose, ce qui donne une mixture amère, douteuse, au message ambigu. M. Legrand ne traite pas du dilemme de la séparation d'un couple et des conséquences sur les enfants : il en fait son "fond de commerce", s'étant sans doute dit "Voilà un sujet qui va choquer donc faire des entrées"). La figure du père y est déconstruite, falsifiée, pervertie. Les sentiments du jeune fils (Julien) sont superficiels, manipulés, incertains et déroutants... Un gosse "déchiré" entre père et mère ne réagit pas ainsi - sauf au cinéma !

 

Le problème de la garde des enfants est merveilleusement raconté, avec humanité et sans artifices dramaturgiques, dans le chef d’œuvre (un vrai, celui-là) qui a pour titre "Kramer contre Kramer" (américain, 1980).

 

 

Kramer contre Kramer avec Dustin Hoffman

 

 

Quant au montage (primé comme le "meilleur" par les César 2019), non seulement il n'a rien de transcendant mais il manque singulièrement d'efficacité et de limpidité, privilégiant les "effets de manches" (comme ceux d'un avocat), pour surprendre, épater... Il y a de l'inventivité dans ce montage, je le concède, mais quand on a trouvé un "truc", une astuce, on fait en sorte que ça ne crève pas les yeux des spectateurs ! Il y a de belles choses dans ce montage mais une inflation de parti-pris vient tout gâcher. Je décerne ma palme cependant à la séquence finale : précisément là où le "montage" s'efface - pour ainsi dire : un long plan à suspens hitchcockien, sans musique ni tambours ni trompettes, sans dialogues, sans... action. Chapeau ! Il fallait oser à une époque où le clip l'emporte sur le clap.

 

Les plans longs, muets, fixes, sont d'une efficacité redoutable - rare dans le cinéma français. Je dis bravo à M. Legrand... sur ce plan-là ! Les mouvements de caméras "gratuits" ne parasitent pas la narration. La photo est vivante et assez novatrice : l'inventivité est au rendez-vous. L'utilisation de l'obscurité est également fort astucieuse, ce qui change du cinéma trop éclairé - même de nuit !

 

L'idée de départ a-telle "kramé" ?

 

J'ai connu personnellement une affaire de "garde d'enfants" douloureuse et qui aurait pu mal finir. Le "beau rôle"  était tenu par le géniteur et non la génitrice qui avait même menacé de "tuer l'enfant plutôt que le confier" au père ! Là-encore, j'en suis témoin, la paternité avait le dessus (le papa s'était battu bec et ongles envers et contre tous) - ce qui ne semble pas être admis dans une société où les "femen" sévissent.

 

 

Dossier de presse

 

Les comédiens font une prestation remarquable, "naturaliste" à souhait (comme j'aime!), bien dirigé par Xavier Legrand - rendons aux César ce qui revient à Legrand. Sur le papier, je l'ai dit plus haut, si leur psychologie fictive dérange, en tant qu'acteurs, Léa Drucker (la mère), Denis Ménochet (le père) font leur boulot et le font très bien avec un immense talent ! Ce ne sont pas eux qui sont "faux", ce sont leurs personnages. Le garçon Julien, incarné par Thomas Gioria, est d'une extraordinaire justesse, avec une sensibilité précise, une gestuelle impeccable, des expressions si prenantes qu'on en oublie ce qui ternit son rôle.

 

Autre point remarquable : l'absence d'une musique off omniprésente - c'est si rare au cinoche !

...

Le drame des gardes d'enfants de parents en conflit est une chose bien trop sérieuse pour qu'on la confie à un cinéaste mal inspiré - et encore moins à l'Académie des César.

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